NOCE de Jean-Luc Lagarce

Mise en scène Pierre NOTTE

assisté d’Amandine SROUSSI

DOSSIER NOCE


Présentation de la pièce

Un repas de noce va avoir lieu ce soir dans une petite ville. C’est un repas grandiose, bourgeois. Des centaines d’invités, un cadre exceptionnel, un évènement. Un homme, un monsieur, une dame, une femme et une jeune fille veulent assister à cette noce et s’invitent frauduleusement au repas. Ils passent des barrages, des gardes, des chiens, des policiers, des domestiques. Inventent des prétextes, des cartons d’invitations perdus…Enfin ils y sont. Relégués au fin fond d’une enfilade de salles de réceptions plus majestueuses les unes que les autres, ils sont finalement installés tout au bout, bien loin des mariés et de leurs familles. Mais qu’importe, il fallait être là, même loin, même tout petits. La soirée se déroulera d’abord selon le rituel : on fait connaissance, on attend les plats, on invente des bons mots, des discours avortent en riant… Puis tout prend un tour surréaliste ; l’amertume, l’envie, la naïveté aussi vont amener ces 5 personnes aux actes les plus fous. Mus par le besoin irraisonné de voir, de savoir, de connaître, ils vont se livrer au saccage, au pillage, tout balayer de ce monde qui n’est pas le leur.

Le metteur en scène

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Pierre Notte est auteur, compositeur, metteur en scène et comédien.

Il signe notamment La Chair des tristes culsSortir de sa mère C’est Noël tant pis ;Demain dès l’aube Et l’enfant sur le loup ;Pour l’amour de Gérard Philipe Bidules trucs Deux petites dames vers le Nord ;Les Couteaux dans le dos J’existe foutez-moi la paix Journalistes Moi aussi je suis Catherine Deneuve. Ses pièces sont traduites et présentées en France, en Belgique, en Allemagne, en Italie, en Autriche, au Portugal, en Angleterre, en Grèce, au Japon, en Bulgarie, aux États-Unis, au Liban ou en Russie. Ses pièces sont mises en scène par Jean-Claude Cotillard, Masaru Hirayama, Patrice Kerbrat, Anne-Laure Liégeois, Sylvain Maurice, Vladimir Petkov, Patrick Schoenstein, Valéry Warnotte, ou lui-même :J’existe foutez- moi la paix, cabaret ; Pour l’amour de Gérard Philipe ; Sortir de sa mère La Chair des tristes culs ; il met en scène Kalashnikovde Stéphane Guérin (création mai 2013 au Théâtre du Rond-Point, prix Diane et Lucien Barrière.) Il est l’auteur de romans, La Chanson de Madame Rosenfelt (éditions Maurice Nadeau) ou La Nuit irrésolue (éditions Loris Talmart), et de pièces radiophoniques pour France Culture. À Tokyo, il donne à plusieurs reprises des récitals de chansons. Il chante également à Bologne, à Rome ou à Washington. Il est nommé à trois reprises dans la catégorie « auteur » aux Molières. Il reçoit le prix jeune talent de la SACD, et le prix Émile Augier décerné par l’Académie française, et le Publikumspreis du Blickwechsel à Karlsruhe, en Allemagne. Pierre Notte est chevalier de l’ordre des Arts et des Lettres.

Note d’intention

(Pierre Notte, metteur en scène, décembre 2014)

On ne sait pas qui ils sont, on ne le saura pas.Tout est à inventer de ce côté là. Il n’y a pas de prison dramaturgique, pas de carcan psychologique, pas d’action entre eux à organiser, ils sont au-delà de ces questionnements là.

Ils forment cinq entités abstraites, puis une sorte de meute.

Cinq être rejetés, à la frontière de la Noce, cet événement indistinct, rite social, sorte de fête funèbre dont on ne sait rien, ou presque, une seule chose mais fondamentale : ces cinq là n’y sont pas invités.

Ce qui est convoqué alors par l’auteur ce sont des identités disparates, dont une narratrice. Autour d’elle, l’enfant, le Monsieur, l’Homme, la Femme, la Dame, comme paumés sur un champ de mines, exclus du regroupement social.

Ils vont s’approcher, se rebeller contre cet état de fait, cette injustice, peut-être formeront-ils alors une meute, pour pouvoir entrer, pénétrer le sacrosaint espace de la fête sociétale. Ils vont ruser, se rapprocher, intégrer la fête coûte que coûte, piller.

Cela va dégénérer, se casser la gueule de partout, parce que ces cinq là, une fois dedans, n’y éprouvent pas la satisfaction fantasmée. Ils s’y lâcheront comme on lâche les chiens, parce que c’est ce que tout un chacun devient vite dans ces circonstances, plongé dans la foule, rapetissé à force d’être en groupe, chacun rabaissé au dénominateur commun du plus dangereux et du plus bête. C’est ce qu’ils sont ces cinq là, des animaux sociaux, des chiens comme tout le monde.

L’espace de la fête de la noce pourrait être du côté de l’avant-scène, à la lisière des rangées des spectateurs, juges et parties, d’abord invités, puis exclus à leur tour quand ces cinq là prendront le pouvoir. Noce est une drôle de pièce de combat, qui met à l’épreuve le rôle du spectateur.

Jean-Luc Lagarce écrit Noce comme Buñuel filme Viridiana. Sans concession, sans merci, sans tomber dans aucun piège de la dénonciation moralisatrice, le bien du côté des exclus, le mal du côté des nantis, et on compatit, merci pour tout et à bientôt. Il écrit Noce comme Les Prétendants, fables politiques, satires ou contes, sans pitié pour personne. Le mal, l’ordure, c’est le système, qui pourrit tout, et tout le monde. C’est une fête macabre, où l’humanité vire au carnage quand elle comprend son erreur, piégée par le système.

La noce, c’est un banquet, une table rectangulaire, une nappe blanche et des tas de trucs et de machins par dessus. Et c’est inaccessible. Lointain, objet de ressentiments et d’envies. Il y a les tracés lumineux au sol, qui empêchent, excluent. Des lignes de lumières crues, violentes, qui bougent. Des carrés de lumières, découpes, où les figures de Lagarce sont enfermées, puis qui s’élargissent, dangereusement, quand elles se rapprochent de la noce, jusqu’à l’atteindre, jusqu’à la dévaster.

Noce est une pièce chorale, frontale, musicale. Beaucoup de parole, une situation unique, peu d’action si ce n’est que tout dégénère tout le temps.

C’est un poème d’indignation, de révolte, de combat, absurde et drôle, très déconnant. C’est une fête et une conflagration que l’on doit quitter enjoué, atteint, pas tout à fait semblable. La mise en scène doit pouvoir inventer une forme, une narration active, une action permanente qui visera au bouleversement des rôles de chaque côté de l’avant-scène, et qui décalera sensiblement les regards sur ce qui domine, qui devra bousculer notre appréhension de la « propagande dominante », de tout ce qui est du bon côté contre tout ce qui n’y est pas.

PN

 

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